Loi « Avia » contre la cyberhaine : le texte adopté par l’Assemblée, la députée accusée de harcèlement

Laetitia Avia
Laetitia Avia. — G.Garitan / Wikimedia Commons

Alors que sa loi controversée contre la haine en ligne vient d’être adoptée par l’Assemblée nationale, la députée LREM est accusée de harcèlement par d’anciens collaborateurs.

Ça devait être la journée de Laetitia Avia. Ce mercredi 13 mai, la députée de La République en Marche était à l’Assemblée nationale pour présenter en dernière lecture et faire adopter sa proposition de loi de lutte contre la haine sur Internet. Mais cette mise en lumière est entachée par des accusations de racisme, de sexisme, d’homophobie et d’humiliation par cinq ex-assistants parlementaires.

Mediapart épingle la députée

L’affaire part d’une enquête publiée mardi soir sur Mediapart. Le site d’investigation en ligne donne la parole à cinq anciens membres de l’équipe parlementaire de Laetitia Avia. Ils dénoncent ses « humiliations à répétition » ainsi que ses propos à caractère racistes, sexistes et homophobes. Preuves écrites et captures d’écran à l’appui, l’enquête montre que l’élue insultait « les députées qu’elle n’aime pas de pute” », qu’elle faisait régulièrement des remarques moqueuses à son assistant d’origine chinoise ( « ça sent le chinois », « tu es un faux Chinois, tu ne maîtrises pas Mac » … ), ou encore qu’elle disait avoir « voté l’amendement des PD » en faveur des réfugiés LGBT.

Au-delà des propos dégradants, les anciens collaborateurs de Laetitia Avia auraient subi des pratiques managériales illégales. D’après l’un d’eux, « Avia, c’est un système qui vous broie ». Ainsi, ils se plaignent d’avoir été sollicités de 7h à 1h du matin même le week-end, et d’avoir dû effectuer des tâches qui n’entraient pas dans le cadre de leur mission, comme gérer ses rendez-vous personnels ou réserver des places à Roland-Garros pour son mari.

Quelques heures seulement après la diffusion de l’enquête, la députée de la majorité déplore sur Twitter un « acharnement », des « accusations mensongères », et un « tableau mensonger » de la part du journaliste David Perrotin.

Une loi controversée contre la haine en ligne

Cette affaire ne va pas aider Laetitia Avia à défendre sa loi déjà contestée contre le cyber-harcèlement. Cette proposition de loi « visant à lutter contre les contenus haineux sur Internet », qui vient d’être adoptée aujourd’hui par l’Assemblée nationale après un marathon législatif d’un an, inquiète de toutes parts.

Elle oblige notamment les plateformes à retirer dans les 24h, sous peine d’amendes pouvant aller jusqu’à 1,25 million d’euros, tout propos incitant à la haine, la violence, la discrimination, ou faisant l’apologie du terrorisme ou de crimes contre l’humanité. Un bouton unique de signalement devra également être mis en place sur les réseaux sociaux. Mais surtout, la loi permettra aussi aux multinationales du numérique de récupérer des mains de la justice le contrôle des propos diffusés sur leur plateforme. Elles seront donc en capacité de juger elles-mêmes leur caractère « haineux », laissant la porte ouverte à tous les excès et à la « sur-censure ».

La loi est jugée dangereuse pour la liberté d’expression par douze ONG, dont la Ligue des droits de l’Homme, le Conseil national du Numérique, et la Quadrature du Net. Selon elles, « en contournant les prérogatives du juge judiciaire, le texte porte atteinte aux garanties qui nous permettent aujourd’hui de préserver l’équilibre de nos droits et libertés fondamentaux ».

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